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Caroline Corbasson et Andrea Montano

03.12.2022 - 21.01.2023
Basses Lumières
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Caroline Corbasson et Andrea Montano

Photo : Alexandre Wallon
Basses Lumières

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Caroline Corbasson et Andrea Montano

Photo : Alexandre Wallon
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Caroline Corbasson et Andrea Montano

Photo : Alexandre Wallon
Basses Lumières

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Caroline Corbasson et Andrea Montano

Photo : Alexandre Wallon

Suite à une résidence au Laboratoire d'Astrophysique de Marseille (LAM) en 2019-2020, Caroline Corbasson reçoit une archive photographique dont elle ne sais pas bien quoi faire... Pour elle cette centaine de négatifs de vues de l'espace sont des reliques, des objets obsolètes qu'elle trouve beaux en eux-mêmes. Lorsqu'elle les montre à Andréa Montano, il a ce réflexe de photographe de vouloir en faire des tirages. À cette époque, Andréa vient juste d'obtenir une place au sein d'un labo argentique à Aubervilliers, il y passe le plus clair de son temps. C'est alors que les artistes entreprennent d'expérimenter avec les négatifs. Caroline Corbasson vient du dessin, elle n'est pas familière du labo photo. Grace à Andrea Montano, elle apprend la technique du tirage et en découvre toutes les possibilités. Le fil conducteur de la série Heat est le spectre coloré : du bleu chaud au rouge glacial de l'espace. On classe traditionnellement les rouges parmi les couleurs chaudes, ce qui est corroboré par de nombreuses réalités : les infra-rouges et les micro-ondes sont des ondes capables de chauffer. Les bleus sont quant à eux froids. Dans l'espace, la couleur dépend de la température d'un corps. Plus la température d'un corps est élevé, plus sa couleur, sa lumière émise remonte le spectre électromagnétique : à 37 °C, notre corps émet en infra-rouge. À 1 000 °C, l'acier incandescent est rouge-orangé. À 3 000 °C, le filament d'une lampe est blanc. Les étoiles les plus chaudes à 30 000 °C sont bleues.


 


Quand Laure-Anne (AREA Books) a découvert les premières épreuves de ce travail, l'éditrice a proposé à Caroline Corbasson et Andrea Montano de réaliser un livre qui sera publié début février 2023.


 


Tracks (rails, chemins, traces) est une autre histoire, également conçue à quatre mains, pendant les confinements dûs à l'épidémie de Covid, lorsqu'Andréa Montano et Caroline Corbasson se sentent « privés de printemps ». Ils mettent en scène des fleurs dans l'atelier de Caroline Corbasson à Clichy. Les artistes livrent un travail unissant deux sciences à priori éloignées : l'astrophysique et la botanique. Ces deux champs de recherche leur inspirent des tirages au charbon qui révèlent une filiation lointaine entre le règne végétal et le règne minéral. Passées sous une lumière noire, les pétales d'une fleur se parent de tâches phosphorescentes résultant du phénomène de pollinisation, mais qui sous l'objectif des artistes deviennent les traces séminales des astres sur leurs progénitures terrestres.


 


Caroline Carbosson (1989, Fra) est la petite fille d'un des protagonistes de la fondation de la société Angénieux, créée en 1935 et réputée depuis près d'un siècle pour la fabrication d'objectifs photographiques et cinématographiques. Diplômée de Saint Martin School, London et de l'ENSBA Paris, Caroline Corbasson appartient à la jeune génération d'artistes qui marient la réalité physique et les cultures humaines. Elle décrit le monde actuel, ses sociétés, ses cultures, à partir des matières qui le composent, et non plus à partir de données purement sociales ni même humaines. Sans revendiquer la posture du scientifique, l'artiste explore la façon dont l'observation de l'espace et le perfectionnement des outils astronomiques ont provoqué une rupture entre la perception immédiate, celle de l'individu moyen, et celle des scientifiques. Ses dessins, photographies, sculptures et vidéos scrutent minutieusement cette étendue, mettant en rapport l'infiniment grand, dont l'évolution remonte à une période anté-culturelle, et la profondeur de l'infiniment petit, perceptible grâce aux outils de la science.

Texte rédigé par les artistes à propos de la série Heat :


Andrea Montano
« Ce projet nait d'une rencontre avec des négatifs. Caroline a reçu une boîte de films noir et blanc, issus d'une technologie dépassée. Je me souviens d'ouvrir une boîte de négatifs où la poussière et les étoiles se superposaient et se confondaient. L'infiniment grand et l'infiniment petit, les thèmes de Caroline, m'ont sauté aux yeux. J'avais envie de voir tout ça en grand, de les faire exister pour de vrai. D'avoir des étoiles dans les mains, en papier et en couleur.

Caroline Corbasson
La série Heat, réalisée à quatre mains, nous a permis de rendre hommage à une archive photographique qui nous avait été léguée par le laboratoire d'Astrophysique de Marseille il y a quelques années lors d'une résidence. Une centaine de négatifs nie et blanc, du ciel. Galaxies, nébuleuses, étoiles des images aujourd'hui délaissées, obsolètes, car largement « dépassées » en matière de précision. Ces négatifs qui sommeillaient depuis de nombreuses années ont renoué avec la lumière, leur matière première. Libérées de leur exigence scientifique, elles donnent à voir un ciel évocateur, poétique : autant de fenêtres sur un univers qui malgré les avancées technologiques, demeure insondable.

Andrea Montano
Habituellement, je tire mes négatifs, mes photos ; des visages et des paysages. Ici, pour la première fois, il s'agit de négatifs étrangers. Je n'ai pas de sentiment de loyauté envers le moment de la prise de vue. Qui plus est ce ne sont pas des images de la terre, d'un réel que je comprends. Je suis dans l'espace, libéré d'un cadre de prise de vue terrain, réaliste. Ces négatifs m'ont permis de faire en profondeur ce que j'avais toujours pressenti, expérimenté dans le labo; Des aplats de couleurs parfaites, éclatantes, organiques, qu'offre le tirage chromogène; j'étais libre et excité de faire des tirages selon les couleurs qui nous plaisent, sans aucune limite. Choisir la couleur du ciel et des étoiles.

Caroline Corbasson:
Plongée dans le noir absolu. Il faut mémoriser les gestes, compter les temps d'exposition, connaitre l'emplacement de chaque bouton de l'agrandisseur. Manipuler des négatifs du ciel lointain dans l'obscurité opaque du laboratoire a quelque chose d'assez mystique. Après avoir exposé le papier photosensible, il y a l'attente, l'impatience de voir : puis le moment sacré de la révélation. Une image apparait, chimique, tangible. Je me suis souvent sentie reliée aux astronomes, qui dans l'obscurité de leurs coupoles, produisirent les négatifs que nous avons employés. Les longues heures passées avec Andrea dans ce laboratoire ont vu se succéder des émotions diverses ; excitation, déception, doute, curiosité, confiance. Se fier à nos intuitions, avancer à tâtons dans le noir, échouer, recommencer. Je dois reconnaitre que certains ratages ou accidents techniques ont trouvé grand intérêt à mes yeux : des tirages ayant subi une fuite de lumière, semblable à une brûlure, ou des tirages exposés trop longtemps, d'un noir profond. Le laboratoire est un espace plein de promesses, de moments de grâce. »