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Julien Mignot

10.11.2017 - 03.03.2018
96 Months
96 Months

96 Months

Julien Mignot

vue d'xposition 96 Months, Julien Mignot. Photo Ava du Parc
96 Months

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Julien Mignot

vue d'xposition 96 Months, Julien Mignot. Photo Ava du Parc
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Julien Mignot

vue d'xposition 96 Months, Julien Mignot. Photo Ava du Parc

Entre 2008 et 2016, soit chaque mois pendant 96 mois, Julien Mignot (1981) a sélectionné une image de ses errances photographiques. "96 months" est fait de ces pièces choisies et forme un puzzle intime. La série complète de la série est visible à la galerie en tirages "Fresson" et "baryté". Texte de Léa Chauvel-Lévy : Vermeer peint vers 1668 Le Géographe. Julien Mignot ne ressemble aucunement au sujet du tableau, un homme attablé à sa table de travail, décati et gagné par le temps, mais étonnamment, il m?y a toujours fait penser. J?ai compris plus tard pourquoi. Julien a étudié la géographie avant de découvrir qu?il deviendrait photographe. En réalité, je crois qu?il n?a pas vraiment déserté les territoires de cette discipline. Ces territoires sont devenus sensibles, incarnés mais c?est toujours la terre, ses paysages et les humains qui les arpentent qu?il continue à sonder. La méthode a changé. La tonalité et la musique aussi, mais la partition est toujours la même, où vacillements du monde et ondes sismiques déploient cette fois une carte intime. La sienne, faite de lignes simples, reliées par des points personnels, comme dans ce jeu d?enfant où il faut suivre les numéros qui se succèdent, pour dessiner une forme fragile. Montagnes rougies par le soleil sur le déclin, vallons perdus et coincés dans l?inconnu, chemins vicinaux refroidis par la neige,routes brunes vers l?infini... Le géographe a muté, s?est doté de couleurs et a repeint le monde. Pas d?instant décisif, surtout pas. Mais une narration singulière où se projeter. L?image n?est pas prise dans sa toile, proie d?une araignée qui l?y aurait jeté, au contraire elle vit encore. Regardez les pieds de cette fille endormie, ils vont bouger, elle va se réveiller. Il n?y a aucune concordance des temps à trouver dans cette écriture photographique profondément actuelle. Les images de Julien Mignot « présentent » un monde, plutôt que l? « enregistrent ». Lui rendent sa présence. Ce couple, impudique et heureux continue de s?embrasser devant nous. Comment, alors qu?il fait jour lorsque que je la guette, cette femme de dos, peut-elle scruter le noir de la nuit, cape jetée à l?aveugle sur la campagne ? Rarement, aura-t-on vu autant image en train de se faire. Se tramer sous nos yeux, s?écrire à notre vue. Celle-ci se tisse à mesure que notre regard se pose sur elle et bannit dès lors toute possibilité d?être retenue captive dans le passé. Ni araignée, ni toile, l?image vit encore, chasseuse de mort, créant ex nihilo le cadre toujours vivant de sa vie intérieure. (Léa Chauvel-Lévy)