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Julien Mauve

12.05.2023 - 10.06.2023
Il Miracolo

Pour sa troisième exposition personnelle à la galerie, Julien Mauve offre une nouvelle interprétation du thème de la disparition, sujet récurent dans son travail. Il Miracolo I, réalisé à Naples et Il Miracolo II, à Venise, célèbrent le feu et l'eau, éléments qui décrivent et composent l'Univers. Le feu et l'eau sont éssentiels au cycle de la vie mais ils peuvent l'interrompre à tout moment. La menace du Vésuve à Naples et l'enlisement de Venise renvoient à la question de notre fragile existence.

Julien Mauve nous invite à prendre conscience du changement climatique en l'observant sous une nouvelle perspective, la montée du niveau des mers représentant une véritable menace pour Venise et sa lagune. Ce lieu unique et précieux est régi par l'équilibre précaire de son écosystème délicat. En convoquant le concept dabstraction, l'approche de Mauve apparaît comme un antidote à la décadence décrite par Gerolamo Rovetta dans son oeuvre Sous l'Eau et à l'atmosphère étouffante du déclin humain parfaitement dépeinte par Thomas Mann dans sa Mort à Venise : ici, à l'inverse, l'élément anthropique est absent, la ville semblant dépouillée de ses habitants. L'interaction humaine abandonne sa place de protagoniste, disparaissant sous le témoignage des portes et fenêtres fermées et des magasins endormis sous les arcades des portiques. Si le miracle arrive, il sera embrassé passivement comme Venise embrasse son sort : désormais, tout est mollement arrêté, le Zeitgeist suspendu, en attente d'un devenir. Venise se transforme en une relique purifiée par l'inondation. L?eau est l'Eau Sainte : épurée des débris putrides et de la boue, elle génère des images parfois floues, les bâtiments capturés volontairement hors focus au moment de la crue créant, dans une magie paradoxale, un paysage nouveau, serein, onirique et mystérieux. Cette nouvelle atmosphère est calme et influencée par la grandeur du passé qui refuse de se dissiper et fait place à une contemplation infinie où tout semble destiné à devenir témoin de la mémoire impérissable de la magnifique Sérénissime. Les majestueuses figures des mosaïques d'or de la Basilique de Saint-Marc, symbole du pouvoir ancien de la ville portuaire la plus importante du Moyen Age, regardent l'eau monter face à la sacralité du Christ de l'église San Michele , et nous nous interrogeons : comment mourra Venise ? Soudainement engloutie comme le mythe de l'Atlantide ou lentement décomposée, emportant avec elle sa mémoire ? La Cité lacustre, contrairement à la Venus Anadyomène du Titien, s'abîmera car le changement climatique ne laisse aucune chance à la possibilité d?une résurrection. Peut-être que le temps où les hommes avaient un quelconque pouvoir face à ses déroulements est révolu et, battant en retraite, ils l'abandonnent à la sublime vision de la perle de la lagune.